La filière marocaine de l’avocat fragilisée par la canicule
Secouée par une canicule ayant réduit de moitié les volumes attendus, la filière marocaine de l’avocat s’apprête à vivre une campagne 2025-2026 à fort enjeu. Entre risques de tensions sur le marché intérieur et opportunités à l’export, le secteur cherche à transformer ce défi climatique en levier de compétitivité.
Portée par une croissance continue ces dernières années, la filière marocaine de l’avocat se prépare à une campagne 2025-2026 qui s’annonce tendue. La vague de chaleur exceptionnelle qui a frappé le Royaume à la fin du mois de juin a gravement affecté les vergers, réduisant significativement le potentiel de production nationale.
Selon les estimations des professionnels, l’épisode caniculaire, qui a duré trois jours, a anéanti près de 50 % des récoltes attendues, soit environ 80 000 tonnes. Un coup dur pour le secteur, alors que la demande mondiale pour l’avocat connaît un essor soutenu, tant sur les marchés européens traditionnels que dans de nouveaux débouchés en Afrique et au Moyen-Orient.
Malgré l’ampleur des pertes, les acteurs de la filière se veulent rassurants. Ils soulignent que si les perturbations climatiques auront un impact notable, les volumes exploitables resteront conséquents.
Lire aussi : Canicule : Quand la chaleur révèle les fractures d’un monde qui brûle
Cette résilience s’explique par l’élargissement considérable des superficies plantées au Maroc ces dernières années. De nombreux vergers sont désormais en pleine maturité, permettant d’amortir partiellement le choc. Selon les estimations, l’impact réel ne devrait pas dépasser un tiers de la production, ramenant l’offre nationale à un niveau similaire à celui de la saison écoulée.
La contraction de l’offre risque néanmoins d’entraîner des ajustements stratégiques. Certaines grandes exploitations, orientées vers l’export, pourraient différer volontairement leurs récoltes afin de profiter de prix plus avantageux sur les marchés internationaux. Une logique économique compréhensible, mais qui pourrait générer une tension sur l’approvisionnement du marché domestique et se traduire par une hausse des prix à la consommation.
Les professionnels rappellent toutefois que tous les producteurs n’ont pas la même marge de manœuvre : certains peuvent se permettre d’attendre, d’autres doivent vendre rapidement. Cette diversité de profils contribue à assurer un flux régulier de produits tout au long de la saison et limite les risques de pénurie.
Le calendrier traditionnel de la filière joue également en faveur d’un équilibre relatif. La saison marocaine d’export débute en novembre avec des prix généralement élevés, avant de se stabiliser en décembre, lorsque la concurrence du Pérou, du Mexique et de l’Espagne se fait plus forte. Dans ce contexte, une offre réduite en début de campagne pourrait soutenir les prix, mais sans provoquer de flambée incontrôlée.
Au-delà de l’épreuve climatique, la situation actuelle pourrait aussi ouvrir des perspectives. Les exportateurs marocains ont la possibilité de mettre en avant la qualité gustative des fruits épargnés par la chaleur et de renforcer leur présence sur les segments premium du marché européen, particulièrement friands d’avocats haut de gamme.
Selon les experts, pour la saison 2025-2026, l’enjeu central sera donc de préserver un équilibre délicat : maintenir la compétitivité internationale tout en garantissant un approvisionnement suffisant au marché intérieur. La capacité du secteur à ajuster ses dates de récolte, optimiser sa logistique et répondre avec souplesse aux aléas climatiques sera déterminante pour conforter la réputation du Maroc comme fournisseur fiable sur le marché mondial de l’avocat.