Economie

Le Maroc mise sur l’autoproduction pour accélérer sa mutation

Le Maroc engage une nouvelle phase de sa transition énergétique en misant sur l’autoproduction électrique comme levier stratégique pour répondre aux défis de l’approvisionnement et améliorer la compétitivité. Cette orientation s’inscrit dans un contexte de mutation du modèle énergétique national et de réformes destinées à réguler et stimuler la production décentralisée.

Le Royaume est confronté à une conjoncture énergétique marquée par une augmentation continue des coûts d’achat de l’électricité. En effet, la réforme du cadre légal a pris forme avec la loi n° 82-21 adoptée en 2021 et promulguée en février 2023. Ce texte encadre trois niveaux d’autoproduction selon la puissance installée. Les installations inférieures à 11 kilowatts nécessitent une simple déclaration, celles comprises entre 11 kilowatts et 5 mégawatts requièrent une demande de raccordement auprès de l’Office national de l’électricité et de l’eau potable (ONEE) ou des sociétés régionales multiservices, tandis que les projets dépassant 5 mégawatts doivent obtenir une autorisation spécifique du ministère de la Transition énergétique et du Développement durable.

Cependant, l’application complète de la loi demeure en attente de plusieurs décrets. Quatre d’entre eux ont été transmis au Secrétariat général du gouvernement en juillet 2025 afin de préciser les modalités d’installation, de raccordement, de stockage, d’écrêtement et de revente de l’électricité excédentaire.

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En effet, d’après le Conseil économique, social et environnemental (CESE), le Maroc dispose d’un potentiel énergétique estimé à environ 500 térawattheures par an, dont 350 térawattheures pour l’éolien onshore et 150 pour le solaire photovoltaïque. De plus, le pays bénéficie d’un ensoleillement moyen compris entre 2 500 et 3 000 heures par an, soit environ 8 heures et 15 minutes par jour.

En outre, l’autoproduction électrique présente des avantages économiques pour les ménages et les entreprises. Les particuliers peuvent couvrir la majorité de leurs besoins domestiques et revendre jusqu’à 20% de leur production au réseau tout en utilisant des dispositifs de stockage, selon Dahir n° 1-23-21 du 19 rajab 1444 (10 février 2023) portant promulgation de la loi n° 82-21 relative à l’autoproduction de l’énergie électrique. Pour les entreprises, l’accès au régime de 5 mégawatts permet de réduire les coûts énergétiques. Parallèlement, selon les estimations du Conseil de la concurrence, le prix moyen du kilowattheure pourrait passer de 0,9 à 0,6 dirham grâce à l’autoconsommation.

Plusieurs limites continuent toutefois d’entraver le développement de ce modèle. En effet, selon des experts, le plafond fixé à 11 kilowatts pour les particuliers restreint la taille des installations domestiques, et les copropriétés sont soumises aux mêmes obligations que les industriels à partir de 11 kilowatts. De plus, l’autoproduction reste limitée à moins de 2% de la production nationale, ce qui réduit son poids dans le mix énergétique.

En parallèle, selon les mêmes sources, la tarification des excédents produits durant les pics de production n’est pas encore définie. Le coût initial des installations photovoltaïques et des systèmes de stockage demeure un obstacle malgré les incitations fiscales. Dans les conditions marocaines, le temps moyen de retour sur investissement est inférieur à cinq ans, mais l’investissement de départ reste difficilement accessible à une grande partie des ménages.

De surcroît, le Conseil de la concurrence recommande plusieurs mesures pour accélérer le déploiement du dispositif. Ces mesures concernent la simplification des procédures administratives, l’assouplissement des plafonds de revente, le renforcement des capacités de stockage, la mise en place d’une filière nationale de batteries et l’intégration des véhicules électriques comme outils de flexibilité du système énergétique.

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