Art & Culture

entrée en vigueur de la réforme du CCM et de l’industrie du cinéma

Avec la promulgation de la loi n°18.23 et ses décrets d’application, le Royaume entend doter son secteur cinématographique d’un cadre modernisé, attractif pour l’investissement et aligné sur les standards internationaux.

L’industrie du cinéma marocain aborde une nouvelle phase de structuration. La loi n°18.23 relative à l’industrie cinématographique et à la réorganisation du Centre cinématographique marocain (CCM), promulguée par le dahir n°1.24.67 du 20 décembre 2024 et publiée au Bulletin officiel n°7365 du 30 décembre 2024, est désormais entrée en vigueur. Le texte redéfinit les règles du jeu pour les producteurs, distributeurs, exploitants et techniciens, tout en conférant au CCM un rôle élargi de régulateur et de catalyseur de la filière.

Selon l’établissement, cette réforme vise à « accroître l’attrait du territoire pour les capitaux nationaux et étrangers, favoriser la création de nouveaux emplois et encourager les règles de saine concurrence ». L’ambition affichée est de faire du cinéma marocain un modèle économique spécifique, susceptible de renforcer l’image du Royaume à l’international.

Le ministère de la jeunesse, de la culture et de la communication a mené, entre janvier et février 2025, un second cycle de consultations associant syndicats de techniciens, associations de producteurs, distributeurs, exploitants de salles, organisateurs de festivals et créateurs de films d’animation. Ces échanges, organisés en huit séances thématiques, ont permis d’intégrer les propositions du terrain dans les futurs textes réglementaires.

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Le CCM a souligné que cette méthode participative visait à « enrichir » la loi afin de l’adapter aux transformations rapides du secteur, tant au Maroc que sur la scène internationale, marquée par la transition numérique et la montée en puissance des plateformes de diffusion.

La mise en œuvre de la loi s’appuie sur le décret n°2.25.365 du 12 juin 2025, suivi de quatre autres décrets publiés au Bulletin officiel n°7432 du 21 août 2025. Ces textes encadrent des domaines clés : inscription des contrats au registre national du cinéma, conditions d’exercice de la production, modalités de distribution et d’exportation des films, régime des visas culturels et commerciaux, reconnaissance du label « studio », exploitation des salles et octroi des cartes professionnelles.

Une période transitoire est prévue. Les autorisations de tournage délivrées avant le 1er septembre 2025 restent valables jusqu’à leur expiration. Les sociétés de production, de distribution et les exploitants disposent jusqu’au 31 août 2026 pour se conformer aux nouvelles règles, tandis que les cartes professionnelles délivrées sous l’ancienne loi n°20.99 demeureront valides jusqu’en 2030.

Un secteur stratégique en quête de compétitivité

Le cinéma marocain s’inscrit dans une trajectoire ascendante depuis une quinzaine d’années. Le pays attire chaque année de plus en plus de tournages internationaux – 127 en 2023 selon le CCM, contre 80 en 2017 – générant des retombées économiques évaluées à plus de 1,3 milliard de dirhams. Parallèlement, le soutien public à la production nationale a permis l’émergence d’une génération de réalisateurs présents dans les festivals internationaux, de Cannes à Toronto.

Cette dynamique reste cependant confrontée à des fragilités : nombre insuffisant de salles (à peine 30 en activité contre plus de 250 dans les années 1980), difficulté de rentabiliser les productions locales et dépendance partielle à la manne des tournages étrangers. La loi n°18.23 entend répondre à ces limites en professionnalisant la filière et en renforçant la transparence de son financement.

Au-delà des enjeux économiques, la réforme du CCM s’inscrit dans une stratégie plus large de rayonnement international. En favorisant la production de films nationaux et la coproduction avec des partenaires étrangers, le Maroc cherche à consolider son soft power culturel. « Le cinéma est un vecteur d’influence et de diplomatie culturelle. Sa modernisation participe directement à l’image du Royaume à l’étranger », souligne un expert en politiques culturelles basé à Rabat.

Les prochains mois seront décisifs pour mesurer l’impact de ce nouveau cadre législatif. Les arrêtés conjoints et ministériels, attendus d’ici la fin 2025, préciseront les modalités opérationnelles. Les professionnels, eux, devront s’adapter à une régulation plus exigeante, mais porteuse de nouvelles opportunités.

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