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Lettre ouverte au Roi ou manipulation fermée ?

À la veille du discours Royal le plus attendu depuis le début des manifestations de GenZ 212, une lettre ouverte adressée à Sa Majesté le Roi circule sur les réseaux sociaux. Une lettre qui, sous couvert de bienveillance patriotique, dissimule mal ses relents d’opportunisme politique et son goût prononcé pour la provocation.

S’adresser au Souverain n’a jamais été un délit. Le dialogue, dans une monarchie moderne comme la nôtre, n’est pas une faiblesse mais un signe de maturité démocratique. Mais entre interpeller le Roi avec respect et lui intimer des ordres comme à un subalterne, il y a une frontière que certains, manifestement grisés par la lumière vacillante des réseaux, franchissent avec une arrogance déconcertante.

La lettre exige. Elle ne propose pas, elle ne suggère pas, elle ordonne. Elle dicte au Roi de présenter ses condoléances aux familles éplorées, comme si Sa Majesté n’avait jamais su, dans les moments les plus sombres de la nation, se tenir aux côtés de son peuple. Le Maroc tout entier sait combien le Roi a, à maintes reprises, incarné la compassion, la proximité et la douleur partagée. Faut-il rappeler les gestes, les présences, les paroles qui ont  réconforté les familles endeuillées lors de catastrophes ou de drames collectifs ? Nul besoin de lui apprendre l’humanité, encore moins le devoir moral.

La lettre réclame ensuite la libération immédiate de toutes les personnes arrêtées lors des violences, sans un mot, sans une nuance, sans une once d’honnêteté sur le fait que ces violences ont bien existé, qu’elles ont blessé, détruit, brûlé. Comment parler de justice tout en niant les faits ? Comment prétendre défendre la jeunesse tout en blanchissant les excès les plus dangereux ?

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Et comme si cela ne suffisait pas, voilà qu’elle exige la dissolution pure et simple du gouvernement Akhannouch, condition — selon eux — pour qu’un « véritable dialogue » puisse s’ouvrir avec la GenZ 212. Un chantage politique d’une absurdité confondante. Depuis quand dialogue et déstabilisation marchent-ils main dans la main ? Depuis quand construit-on la paix sociale sur les ruines des institutions ? Oui, le gouvernement doit rendre compte et d’ailleurs tout responsable de la situation dans laquelle on se retrouve aujourd’hui et qu’on a tant cherché à éviter en alertant et en dénonçant chacun selon ses moyens.

Nous pensions, naïvement peut-être, que ce mouvement GenZ 212 était porté par des jeunes, authentiques, indignés, pleins d’énergie et de bonne foi. Mais à la lumière de cette lettre, un doute s’impose : qui tire réellement les ficelles ? Les voix que l’on entend aujourd’hui ne sont pas celles de la jeunesse marocaine, mais celles d’anciens visages opportunistes qui se servent de la détresse sociale et de la colère des jeunes comme d’un tremplin pour revenir dans le jeu politique.

Car qui sont ces signataires ? Des individus dont l’âge dépasse largement la génération qu’ils prétendent représenter ; d’autres, déjà discrédités par leurs excès et leurs dérives ; certains encore, poursuivis par la justice ou connus pour leur hostilité systématique envers la monarchie. Ce sont ceux-là mêmes qui ont fait de la critique du Maroc un commerce, de la contestation un slogan, et du trouble social une opportunité personnelle.

Et fidèle à leur logique populiste, ils ne ratent pas l’occasion de pointer du doigt les grands projets nationaux — la LGV, les stades, les infrastructures — en les érigeant en symboles d’un prétendu gaspillage. Mais le Maroc n’a jamais eu à choisir entre la dignité sociale et la modernité. Une nation responsable sait répondre aux besoins urgents de son peuple tout en préparant son avenir. Opposer les chantiers du présent à ceux du futur, c’est condamner le pays à l’immobilisme et au renoncement.

Car soyons clairs, oui, il existe une rage sociale, un mécontentement profond, un sentiment d’injustice que personne ne peut nier. Le coût de la vie, les inégalités, la difficulté d’accéder à un emploi digne, tout cela pèse sur les épaules d’une génération qui veut croire en son pays mais ne voit pas encore assez de réponses concrètes à ses attentes.

Le Maroc vit une période de tension, et c’est précisément dans ces moments-là que la sagesse et la mesure doivent guider les voix publiques. Et c’est ici qu’intervient la confiance du peuple dans son Roi. Car nous le savons, chaque fois que la situation s’envenime, Sa Majesté choisit le recul et la réflexion avant l’action. Et chaque fois, ses décisions, profondes, mesurées, inattendues parfois, viennent calmer les esprits, apaiser les cœurs et rétablir la confiance. Il n’a jamais fui le dialogue ; il l’a toujours initié, mais dans le respect de l’État et de ses institutions.

Mais de là à lui donner des ordres, à lui imposer des gestes ou des décisions, c’est franchir toutes les lignes rouges du respect et de la décence. Le Roi n’est pas une variable d’ajustement politique, il est le garant de la stabilité, le symbole de la continuité et le protecteur de tous, sans distinction.

Cette lettre n’est pas la voix du peuple ni une expression de la jeunesse mais la caricature d’une revendication manipulée. Elle ne parle pas pour la GenZ 212, elle parle sur elle, au-dessus d’elle, en l’instrumentalisant. C’est le bruit d’un petit groupe en mal d’existence, qui cherche à troubler un moment de vérité nationale. Le Maroc, lui, saura écouter sa jeunesse, la vraie, celle qui rêve de justice sans haïr ses institutions, celle qui revendique sans renier, celle qui aime son pays sans condition.

Et quand le Roi prendra la parole, il ne s’adressera pas aux opportunistes de circonstance, mais à cette génération sincère qui veut comprendre, construire et grandir.

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