Economie

un essor fragile sur fond de déséquilibres

Entre 2021 et 2024, le commerce extérieur du Maroc a connu une forte expansion, illustrant son intégration croissante dans l’économie mondiale. Toutefois, cette dynamique s’accompagne d’un déficit commercial alarmant, poussant les experts à recommander des réformes urgentes en matière d’énergie, de politique commerciale et de soutien à la production locale.

Le commerce extérieur du Maroc a connu un développement remarquable au cours des dernières années, illustrant une volonté affirmée du Royaume de renforcer son intégration dans l’économie mondiale. Entre 2021 et 2024, la valeur totale des échanges commerciaux a grimpé de manière significative, passant de 858 à 1 217 milliards de dirhams. Cette progression de plus de 40 % témoigne d’une dynamique soutenue dans les relations commerciales internationales du pays.

Cette montée en puissance reflète certes une ouverture croissante sur les marchés extérieurs, mais elle cache également des déséquilibres persistants. Comme le souligne Finances News Hebdo, l’essor des échanges s’est accompagné d’un creusement du déficit commercial. Celui-ci est passé de 199 milliards de dirhams en 2021 à 305 milliards en 2024. Cette détérioration s’explique principalement par une augmentation des importations à un rythme plus rapide que celui des exportations. En conséquence, le taux de couverture, qui mesure la part des importations financée par les exportations, a baissé, passant de 61,8 % à 59,8 % sur la période étudiée.

Un autre indicateur clé de la santé commerciale du pays est le degré d’ouverture de son économie, mesuré par le rapport entre les échanges extérieurs et le produit intérieur brut (PIB). Cet indicateur a connu un pic en 2022, atteignant 85,8 %, avant de s’établir à 77,7 % en 2024. Cette évolution confirme à la fois l’insertion du Maroc dans les chaînes de valeur mondiales et une forte dépendance vis-à-vis de l’étranger pour l’approvisionnement en biens stratégiques, notamment les hydrocarbures, les céréales et divers intrants industriels.

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Pour les experts, cette tendance est source de préoccupation. Le déficit commercial, s’il continue à s’aggraver au même rythme, risque de fragiliser davantage l’équilibre économique du pays. Néanmoins, certains facteurs permettent pour l’instant de contenir les effets négatifs. Les revenus issus du tourisme, les transferts financiers des Marocains résidant à l’étranger, ainsi que les performances solides de certaines industries exportatrices comme les phosphates, l’automobile ou l’aéronautique, ont joué un rôle tampon, limitant la détérioration des réserves en devises.

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Cependant, la vulnérabilité du Maroc sur le plan énergétique demeure l’un des principaux défis. La facture énergétique représenterait à elle seule près de la moitié du déficit commercial. Cette dépendance devient particulièrement coûteuse en période de flambée des prix internationaux. À cela s’ajoute une facture alimentaire importante, exacerbée lors des épisodes de sécheresse, qui affectent directement la production agricole nationale.

Les projections pour les prochaines années ne sont guère rassurantes. Si aucune réforme structurelle n’est engagée, le déficit pourrait atteindre entre 300 et 340 milliards de dirhams d’ici 2027. Pour y faire face, les experts plaident pour une accélération de la transition énergétique. Le Maroc dispose d’un fort potentiel en matière d’énergies renouvelables – solaire, éolien, hydraulique – qu’il conviendrait d’exploiter davantage afin de réduire la dépendance aux énergies fossiles importées.

Au-delà de la question énergétique, les spécialistes insistent également sur la nécessité de diversifier les marchés d’exportation. Le Royaume reste encore trop tourné vers l’Europe, ce qui le rend vulnérable aux fluctuations économiques de cette région. Une ouverture renforcée vers l’Afrique, l’Asie ou l’Amérique latine pourrait offrir de nouvelles opportunités pour les exportateurs marocains, notamment dans les secteurs à forte valeur ajoutée.

Enfin, une révision des accords de libre-échange s’impose. Le Maroc, bien que respectueux de ses engagements internationaux, se retrouve parfois lié à des partenariats jugés déséquilibrés. Certains accords, comme ceux signés dans le cadre du processus d’Agadir ou celui avec la Turquie, mériteraient d’être réévalués afin de mieux protéger les secteurs clés de l’économie nationale, en particulier l’agriculture, l’énergie et l’industrie locale.

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