Economie

Trois multinationales du textile sous enquête pour fraude

Trois multinationales étrangères du secteur textile sont dans le collimateur de l’Administration des Douanes et Impôts Indirects. Soupçonnées d’avoir abusé du régime d’admission temporaire, ces sociétés auraient évité le paiement de droits et taxes de plusieurs milliards de dirhams.

L’Administration des Douanes et Impôts Indirects (ADII) a engagé une enquête approfondie sur trois entreprises étrangères installées au Maroc et actives dans l’industrie de l’habillement. Ces sociétés auraient utilisé à mauvais escient le régime d’admission temporaire, un dispositif fiscal destiné à favoriser les exportations, pour détourner les avantages douaniers et éluder le paiement des taxes dues.

Cette opération, coordonnée par la direction centrale du contrôle et mise en œuvre par les brigades régionales de Casablanca et Tanger, découle d’un signalement émis par les services de renseignement douanier. Les premiers éléments de l’enquête font apparaître un système de fraude élaboré, reposant sur des déclarations fictives et la manipulation de documents commerciaux.

Les entreprises concernées auraient importé d’importants volumes de tissus sous couvert de transformation locale avant réexportation vers l’Europe. Mais selon les constatations des enquêteurs, une grande partie de ces matières premières n’a jamais quitté le territoire national. Certaines auraient été utilisées pour confectionner des vêtements destinés au marché intérieur, en dehors de toute procédure réglementaire.

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Pour justifier ces anomalies, les sociétés auraient eu recours à de faux documents : factures d’annulation fabriquées, procès-verbaux altérés et prétendus refus de commandes émis par des clients européens. Ces subterfuges visaient à donner l’apparence d’exportations annulées, tout en maintenant les marchandises sur le sol marocain sans s’acquitter des droits de douane.

Dans certains cas, les tissus importés auraient été remplacés par des produits fabriqués localement, de qualité moindre, alimentant un circuit parallèle de production. Ces anomalies ont été détectées grâce au système BADR (Base Automatisée des Douanes en Réseau), plateforme numérique qui centralise et analyse en temps réel les opérations douanières du pays. Les algorithmes du système ont identifié des incohérences majeures entre les flux d’importation et les volumes réellement exportés.

Les investigations ont conduit à plusieurs perquisitions dans les entrepôts et filiales marocaines des sociétés visées. Les agents de l’ADII y ont découvert des tonnes de tissus importés sous régime temporaire, stockés sans traçabilité claire. Les explications fournies par les responsables, évoquant notamment la détérioration des stocks, ont été jugées non crédibles, les taux de perte autorisés par la réglementation étant strictement limités.

Les sanctions envisagées pourraient être très lourdes, avec des amendes atteignant plusieurs dizaines de millions de dirhams et des redressements fiscaux significatifs. Les faits reprochés s’apparentent à de la fraude douanière, à la falsification de documents commerciaux et à la violation des règles de change, en raison du non-rapatriement des recettes d’exportation fictives.

Au-delà du volet judiciaire, cette affaire illustre la modernisation des mécanismes de contrôle de l’ADII. Grâce à la digitalisation, à la traçabilité et à l’intelligence des systèmes de détection, l’administration marocaine renforce sa capacité à identifier les fraudes complexes et à sécuriser les régimes préférentiels.

Elle envoie également un signal fort aux opérateurs économiques : le Maroc entre dans une ère de transparence et de rigueur, où les dispositifs d’incitation à l’exportation ne peuvent plus être détournés sans conséquences.

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