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l’avenir d’un mouvement en jeu

Il y a quelques jours, la jeunesse marocaine écrivait une page historique. Par des actions pacifiques, inventives et organisées, elle avait su imposer le débat public. Ses revendications étaient claires, justes et légitimes : une santé accessible, une école digne, un avenir possible dans ce pays qu’elle voulait contribuer à rebâtir, non fuir. Le ton était ferme mais constructif, et le gouvernement commençait à écouter.

Mais voilà que cet élan risque de se briser : une partie de la jeunesse a choisi la voie de la casse, des affrontements et du chaos. Incendies de véhicules, jets de pierres, attaques contre les forces de l’ordre, attaques contre les institutions, scènes de vandalisme filmées et diffusées sur les réseaux. Les images récentes ne montrent plus une contestation citoyenne, mais une dérive inquiétante. On n’y voit plus des slogans porteurs d’espoir, mais des violences qui rappellent les pires moments de l’anarchie urbaine.

En franchissant cette ligne rouge, ces jeunes risquent d’anéantir le capital de sympathie et de légitimité qu’ils avaient patiemment gagné. Ce ne sont plus des manifestations, mais des débordements qui effacent le sens du combat et discréditent un mouvement qui avait su fédérer au-delà de ses rangs. Oui, les injustices sont criantes. Oui, l’écart entre milliards pour des stades et hôpitaux en souffrance est insupportable. Mais transformer la colère en violences, c’est faire montre de mauvaise foi.

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Le paradoxe est cruel : au moment même où le gouvernement commençait à reconnaître l’urgence d’agir, où le débat public s’ouvrait enfin, la stratégie de confrontation brutale brouille le message, fragilise les avancées et expose le mouvement à une spirale de répression. Les premières images de jeunes dignes et déterminés suscitaient respect et soutien. Aujourd’hui, ce sont celles d’affrontements, de flammes et de blessés qui circulent. L’opinion publique, d’abord solidaire, commence à se diviser. Et certains observateurs parlent d’une « bande de casseurs ».

Dans un combat politique, l’image compte autant que le fond. Perdre la bataille de l’opinion, c’est condamner le mouvement à l’échec. L’histoire l’a montré ailleurs : les dérives violentes effacent les causes justes. La jeunesse marocaine doit en être consciente. Ce combat pour la dignité, qui avait commencé avec tant de force et de clarté, ne survivra que s’il reste ancré dans la discipline, la lucidité et le refus de l’anarchie. Car aujourd’hui, le danger est réel, celui de tout perdre : la légitimité, le soutien populaire et la chance d’imposer enfin une transformation que le pays attend.

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