L’Économiste

Entre offres traditionnelles et solutions innovantes, le marché se réinvente

Au Maroc, le marché du crédit à la consommation repose sur un double équilibre entre offres classiques solides et solutions innovantes. Les banques proposent des produits traditionnels adaptés aux besoins des ménages, tandis que les sociétés spécialisées et les fintechs déploient des formules flexibles et digitalisées, conçues pour répondre aux attentes d’une clientèle en quête de rapidité, de transparence et de personnalisation. Vue d’ensemble.

Face à la hausse des dépenses du quotidien et des projets personnels, de plus en plus de familles marocaines se tournent vers le crédit à la consommation. Entre offres classiques des banques, solutions spécialisées et révolution digitale portée par les fintechs, ce marché en pleine mutation s’affirme comme un allié incontournable de la vie des ménages.

Si l’épargne reste privilégiée par certains, le crédit à la consommation s’est progressivement imposé comme un outil de gestion budgétaire indispensable. Dans les quartiers populaires de Casablanca, comme Derb Soltane, Amina, enseignante et mère de deux enfants, témoigne que les frais de scolarité, en plus des fournitures scolaires, des uniformes et des manuels, font rapidement grimper la facture. Le recours au crédit lui permet d’étaler ces frais sur dix mois sans toucher à ses économies destinées aux urgences.

À Rabat, Youssef, cadre dans une société d’assurance, avance, lui, l’argument de mensualités supportables, sans devoir attendre plusieurs années pour économiser. Ces témoignages reflètent une tendance claire : le crédit à la consommation accompagne les ménages dans leurs besoins quotidiens, notamment pour les dépenses imprévues ou lourdes. C’est ainsi que plus d’un Marocain sur quatre a déjà contracté un crédit à la consommation.

Hassan El Alami, directeur général d’une société de financement à Casablanca, souligne que le crédit conso n’est plus un produit de luxe mais un outil de gestion budgétaire, et que les clients recherchent des solutions simples, rapides et transparentes, avec des taux compétitifs et des mensualités adaptées.

Selon les derniers chiffres, l’encours du crédit à la consommation au Maroc dépasse désormais 162 milliards de dirhams, en additionnant les volumes portés par les banques (près de 59 milliards de dirhams à fin juin 2025, +1,8% sur un an) et ceux des sociétés spécialisées comme Wafasalaf, Eqdom ou Sofac (77,8 milliards de dirhams à fin 2024, en hausse de 10,4%). Les nouveaux financements accordés par les sociétés de financement ont atteint 26,1 milliards de dirhams en 2024, soit une progression remarquable de 14,9%.

Des offres diversifiées
Les banques marocaines maintiennent des produits classiques tout en les adaptant aux besoins actuels. Les sociétés de financement spécialisées, telles que Wafasalaf, Sofac, Eqdom ou Salafin, continuent de capter une part importante du marché grâce à leur maillage mais aussi réactivité. Les offres classiques de crédit à la consommation restent le socle du marché.

Le crédit personnel demeure le produit le plus répandu : il permet de financer des projets variés avec un montant libre et des mensualités fixes, offrant ainsi une visibilité budgétaire aux ménages. Autre formule en croissance, le rachat de crédits donne aux familles la possibilité de regrouper plusieurs prêts en une seule mensualité, réduisant ainsi la pression sur leur budget mensuel.

Certains établissements continuent de commercialiser le crédit revolving, une réserve d’argent renouvelable qui offre une grande flexibilité mais qui, en contrepartie, reste l’une des solutions les plus coûteuses du marché. Ces produits, bien qu’anciens, conservent toute leur pertinence car ils répondent à des besoins concrets et immédiats des ménages marocains. Si les solutions classiques dominent encore, le marché marocain du crédit à la consommation connaît une transformation rapide portée par la digitalisation et l’innovation. Les banques comme les établissements de crédit ont développé des parcours entièrement digitalisés : le client peut désormais simuler son crédit, obtenir une réponse de principe en ligne et, dans certains cas, recevoir les fonds sans jamais se déplacer en agence.

Cette simplification séduit particulièrement les jeunes actifs urbains, friands de solutions rapides et accessibles depuis leur smartphone. Certaines institutions lancent également des offres promotionnelles temporaires, avec des taux réduits à l’occasion de la rentrée scolaire ou des fêtes, afin de capter une clientèle saisonnière. Enfin, émergent des solutions hybrides qui combinent le crédit classique et les outils digitaux, offrant ainsi plus de flexibilité et de transparence. Ces tendances dessinent l’avenir du marché marocain : un crédit plus accessible, plus rapide et mieux adapté aux profils des ménages.

Parallèlement, les fintechs introduisent de nouvelles pratiques en utilisant l’intelligence artificielle et le big data pour évaluer la solvabilité en temps réel et proposer des offres véritablement personnalisées. Le secteur dispose d’un fort potentiel de croissance, soutenu par l’augmentation de la bancarisation des ménages et le recours régulier au crédit.

Toutefois, il est essentiel de mettre en place des mécanismes de régulation et des dispositifs pour éviter les risques de surendettement et garantir la soutenabilité de l’endettement des ménages à long terme. Pour Mounir Chraibi, directeur retail d’un établissement de crédit, la vigilance est nécessaire : «Nous encourageons nos clients à utiliser le crédit de manière responsable. Un crédit doit être un outil de confort, pas une source de fragilité financière. C’est pourquoi nous travaillons beaucoup sur la transparence et l’éducation financière».

Crédit conso, pour quoi faire ?

Les fonctionnaires et les salariés du secteur privé représentent la majorité des emprunteurs, bénéficiant de revenus réguliers qui facilitent l’accès au crédit, tandis que les indépendants et professions libérales sont moins nombreux en raison de la variabilité de leurs revenus et de la perception d’un risque plus élevé par les établissements de crédit.

Les emprunteurs les plus représentés sont âgés de 35 à 50 ans, correspondant à une phase de stabilité professionnelle et familiale propice à la souscription. L’utilisation du crédit est affectée principalement pour faire face à des dépenses courantes ou imprévues plutôt que pour des investissements à long terme. Les prêts personnels constituent environ 74,5 % des crédits accordés et sont principalement sollicités pour financer des achats de biens de consommation, des travaux domestiques ou des besoins imprévus.

Le crédit à la consommation est souvent utilisé comme amortisseur social, permettant de maintenir le niveau de vie face à un pouvoir d’achat en déclin, notamment pour les classes moyennes salariées. La durée des crédits a légèrement diminué ces dernières années, avec 43% des crédits ayant une maturité supérieure à 7 ans en 2024 contre 38% pour ceux compris entre 5 et 7 ans.

Ilyas Bellarbi / Les Inspirations ÉCO

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