Le paradoxe du pouvoir d’achat
Malgré des chiffres d’inflation rassurants, les ménages marocains ressentent toujours la pression du coût de la vie. Selon Bank-Al-Maghrib, la croissance pourrait atteindre 4,2 % d’ici 2026, mais les aléas climatiques et les tensions mondiales maintiennent le pouvoir d’achat sous tension, rendant le quotidien des familles incertain.
Officiellement, l’inflation au Maroc reste modérée, mais la perception des ménages traduit une réalité plus contrastée. Entre baisses ponctuelles et hausses persistantes sur les produits essentiels, le coût de la vie continue de peser, alimentant les débats sur le pouvoir d’achat et l’efficacité des mesures publiques.
Selon le Haut-Commissariat au Plan (HCP), l’indice des prix à la consommation (IPC) a légèrement reculé de 0,1% en juillet 2025 par rapport au mois précédent. Sur un an, l’inflation n’excède pas 0,5%, un niveau jugé faible et bien en dessous du seuil de 2% fixé par Bank Al-Maghrib comme objectif de stabilité des prix.
Cette détente résulte surtout de la baisse des prix alimentaires (-0,5%). Les légumes ont fortement diminué (-4,7%), complétés par les fruits (-0,9%) et les huiles (-0,5%). Cependant, ces baisses ne compensent pas la hausse de certains produits essentiels : lait, fromage et œufs (+2,7%), café et thé (+0,6%) ou encore poissons (+0,4%), maintenant une pression réelle sur le budget des ménages.
Lire aussi : Inflation : hausse de l’IPC de 0,5% en juillet
Hors alimentation, l’inflation reste contenue (+0,2%), mais certaines catégories subissent des tensions plus marquées. Les carburants ont augmenté de 3,5%, entraînant une hausse de 1% des coûts de transport. Cette flambée énergétique se répercute sur les prix finaux à travers la production et la logistique. Les services, notamment restaurants et hôtels, continuent leur progression (+0,3%), accentuant la perception d’un coût de la vie élevé pour les ménages.
Si l’inflation annuelle reste modeste, elle masque des disparités sectorielles : les transports reculent de 2,9%, tandis que restaurants et hôtels (+3,4%), enseignement (+2,3%) et logement/énergie (+0,6%) enregistrent des hausses notables. Les écarts sont également régionaux : Meknès (-0,7%), Guelmim (-0,6%) et Laâyoune (-0,5%) voient les prix baisser, alors qu’Errachidia (+0,8%) et Al-Hoceïma (+0,4%) connaissent les hausses les plus importantes. Le ressenti de l’inflation dépend donc autant du panier de consommation que de la région de résidence.
Face à cette situation, Bank Al-Maghrib maintient une politique monétaire accommodante. Le 18 mars dernier, elle a abaissé son taux directeur de 25 points de base, à 2,25%, la troisième baisse en moins d’un an, pour soutenir la croissance et l’investissement.
Dans ce contexte, les analystes estiment que l’économie nationale pourrait évoluer dans un environnement favorable. La croissance, après 3,2 % en 2024, pourrait atteindre 3,9 % en 2025, puis 4,2 % en 2026, portée par l’investissement dans les infrastructures et la reprise de la production agricole, à condition que le climat reste favorable. Néanmoins, cette dynamique demeure sensible aux variations des prix mondiaux, aux tensions géopolitiques et aux aléas climatiques, qui pourraient peser sur le pouvoir d’achat et modifier la perception des ménages.