Economie

Des entreprises dans le viseur de l’ADII

Trois entreprises marocaines sont au cœur d’une enquête pour fraude douanière présumée, relançant les interrogations sur l’intégrité des échanges commerciaux au Royaume. Manipulation des déclarations, sous-évaluation des marchandises et transferts suspects à l’étranger : les premières révélations dressent le portrait d’un système bien rodé.

Selon des informations relayées par les médias, l’Administration des douanes et impôts indirects (ADII) a ordonné à ses brigades régionales opérant aux ports de Tanger Med et de Casablanca de mener des vérifications approfondies. En effet, l’enquête porte sur des entreprises suspectées d’avoir manipulé les caractéristiques techniques et les valeurs déclarées de marchandises importées, afin de réduire les droits de douane dus à l’État.

Ces instructions font suite à des renseignements détaillés fournis par le service d’analyse des risques et de veille de l’ADII. Les données recueillies révèlent d’importantes divergences entre les déclarations officielles et la nature réelle des produits mis sur le marché. Ces anomalies ont conduit les équipes de contrôle à intervenir directement dans les sièges, entrepôts et espaces de stockage des sociétés concernées.

Selon les mêmes sources, les premières constatations font état de falsifications de factures, de sous-évaluations de marchandises et de tentatives de classement de produits dans des catégories à faible taxation, dans le but d’éluder partiellement la fiscalité douanière. La valeur totale des marchandises soumises à vérification dépasse 2,7 milliards de dirhams. De surcroît, les biens concernés comprennent des équipements destinés à l’industrie légère, au bâtiment et aux travaux publics. L’analyse des documents comptables et bancaires a également révélé des transferts de fonds vers l’étranger nettement supérieurs aux montants déclarés aux douanes.

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Parallèlement, les enquêtes en cours montrent également que certains importateurs ont volontairement modifié les spécifications techniques de leurs produits pour les faire entrer dans des catégories à faible taxation, générant ainsi d’importants bénéfices. De plus, la collaboration entre l’ADII et l’Office des changes a permis de découvrir que certaines transactions financières avec des fournisseurs étrangers dépassaient nettement les valeurs déclarées à la douane. Des factures distinctes de celles jointes aux dossiers d’importation ont été retrouvées, laissant penser à une fraude de grande ampleur portant sur plusieurs milliards de dirhams.

Toujours selon les mêmes sources, les enquêtes ont aussi mis au jour l’utilisation abusive du régime de l’« admission temporaire », qui permet l’importation de marchandises exonérées de droits sous condition de réexportation. Des importateurs auraient profité de ce régime pour écouler les produits sur le marché local à bas prix, en contournant l’obligation de réexportation.

En effet, ce n’est pas la première fois que des affaires similaires éclatent. Selon les médias, en 2024, un réseau international impliquant plusieurs dizaines d’entreprises avait été démantelé pour des transferts estimés à 750 millions de dirhams. En 2025, plus de 160 petites et moyennes entreprises (PME) du textile avaient été identifiées pour fraude à l’importation sous régime temporaire, et en 2023, un trafic d’or actif entre Casablanca, Meknès et Tanger avait été découvert.

D’après des études relayées par la presse, la fraude douanière prive l’État de recettes fiscales essentielles, représentant chaque année des centaines de millions de dirhams non recouvrés. Elle provoque aussi une distorsion du marché, en permettant à certains opérateurs d’importer à bas prix des produits qui concurrencent injustement la production locale. En parallèle, elle ternit la réputation du Maroc auprès des investisseurs étrangers, risquant de freiner certains projets industriels et commerciaux.

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