Nouvelle arme des douanes contre la contrebande
Longtemps utilisés par les trafiquants pour écouler discrètement leurs marchandises, les réseaux sociaux deviennent aujourd’hui un allié des douanes. Grâce aux traces numériques laissées en ligne, les services de contrôle parviennent à remonter des filières clandestines et à démanteler des réseaux de contrebande de grande envergure.
Dans un contexte où les réseaux sociaux sont souvent perçus comme un terrain fertile pour la prolifération des marchandises contrefaites, une nouvelle réalité s’impose : ces plateformes se révèlent également être des outils précieux pour les services de contrôle et de lutte contre la fraude. Le récent démantèlement d’un vaste réseau de contrebande en atteste. Les autorités marocaines s’appuient désormais de plus en plus sur les traces numériques laissées par les trafiquants sur le web pour remonter les filières illégales.
D’après les informations relayées par les médias, les services de renseignement et d’analyse des risques de l’Administration des Douanes et Impôts Indirects (ADII) exploitent désormais de manière active les contenus diffusés sur les réseaux sociaux, notamment des vidéos partagées par des Marocains résidant tant au Royaume qu’à l’étranger, en particulier en Chine. Ces publications, souvent anodines en apparence, ont permis de mettre au jour des informations précieuses sur les failles du dispositif douanier exploitées par des réseaux de contrebande bien organisés.
Grâce à cette veille numérique, les services de contrôle ont pu localiser des flux de marchandises suspectes, principalement des vêtements et des chaussures de sport « High Copy », écoulés dans des marchés locaux très fréquentés, notamment à Casablanca. Cette démarche innovante a déclenché une vaste opération de vérification au sein des principales plateformes logistiques du pays, dont le port de Tanger Med, celui de Casablanca et l’aéroport international Mohammed V.
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Les investigations menées visent à confirmer les soupçons portant sur des manipulations frauduleuses de factures et de déclarations douanières orchestrées par certains importateurs dans le but d’introduire sur le marché marocain de grandes quantités de produits contrefaits. Les flux en provenance de Chine et de Hong Kong, identifiés comme les principales zones d’approvisionnement, font l’objet d’une attention particulière.
Cette traque numérique a permis d’identifier non seulement des importateurs et commerçants marocains opérant à l’étranger, mais également des points de stockage stratégiques situés dans des villes comme Mohammedia, El Jadida, Témara, Casablanca, Tanger et Agadir. Certains rapports confidentiels remontés aux services centraux évoquent même l’implication possible d’agents facilitant ces opérations via les points de passage officiels.
Les plateformes comme TikTok se sont ainsi révélées d’une efficacité inattendue. Les douaniers, en suivant les indices visuels et les traces numériques laissées par les trafiquants, ont réussi à localiser et à saisir d’importants stocks de marchandises contrefaites, vendues sous l’appellation trompeuse de « copies haut de gamme ». Ces produits, souvent fabriqués localement dans des ateliers clandestins en périphérie de Casablanca, alimentent un marché parallèle florissant, en partie connecté à des circuits de distribution en Espagne.
Les enquêtes en cours révèlent également que ces réseaux exploitent des tissus légalement importés par des entreprises du secteur textile pour confectionner des articles falsifiés, commercialisés ensuite dans des enseignes qui se présentent comme des boutiques de produits authentiques.
Ces résultats illustrent le virage stratégique pris par l’Administration des douanes dans sa lutte contre la contrefaçon, en adaptant ses méthodes aux nouvelles formes de commerce, notamment via les réseaux sociaux. En 2024, pas moins de 2 millions d’articles contrefaits ont été saisis, pour une valeur de près de 20 millions de dirhams, confirmant une hausse de 11 % par rapport à l’année précédente.