Economie

La CGT saisit Orange au titre du devoir de vigilance

Trois travailleuses marocaines, syndiquées à l’UMT, ont été licenciées par la filiale de Téléperformance à Casablanca. La CGT-FAPT adresse une lettre officielle à la direction d’Orange France, exigeant leur réintégration immédiate. Une affaire syndicale locale qui prend une tournure internationale sur fond d’exigence de responsabilité sociale.

Par lettre du 2 juillet 2025, la CGT-FAPT, branche télécommunications de la Confédération générale du travail (CGT), a adressé un courrier formel à la direction du groupe Orange, à Issy-les-Moulineaux, dans lequel elle dénonce le licenciement abusif de trois salariées marocaines de Téléperformance, survenu à la suite de leur participation à une action syndicale. Les faits remontent au 18 février 2025, lorsque les intéressées accèdent à un plateau de production à Casablanca, dans les locaux de Téléperformance Maroc (anciennement Majorel), où travaillent plus de 250 agents au service du client Orange France.

Dans cette lettre adressée à M. Lecerf, directeur exécutif des ressources humaines du groupe Orange, et à Mme Lelong-Nakhlé, directrice des relations sociales internationales, Rachel Beauséjour, membre du Bureau fédéral de la CGT-FAPT, affirme que ces licenciements constituent une atteinte grave au droit syndical, en violation non seulement du droit du travail marocain mais aussi des engagements internationaux de la France et des normes de l’Organisation internationale du travail (OIT).

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« Ces licenciements ne sont ni justifiés, ni justifiables », écrit la CGT-FAPT dans sa lettre datée du 2 juillet 2025. « Ils contreviennent au droit national marocain, aux conventions internationales du travail ratifiées par les deux pays, et aux principes fondamentaux de liberté syndicale. » Le syndicat français demande à Orange d’intervenir sans délai auprès de son sous-traitant afin d’obtenir l’annulation de la décision, la réintégration des salariées, et la restitution de l’intégralité de leurs droits.

Les plaignantes, toutes syndiquées à l’Union marocaine du travail (UMT), auraient fait l’objet de sanctions disciplinaires déguisées pour leur simple présence sur un lieu de travail où elles exercent un mandat syndical. L’affaire prend une tournure particulière du fait qu’elle implique indirectement un donneur d’ordre français, tenu par les obligations légales du devoir de vigilance inscrites dans la loi française n°2017-399 du 27 mars 2017.

Ce texte impose aux grandes entreprises françaises de mettre en œuvre un plan de vigilance permettant de prévenir les violations graves des droits humains dans leur chaîne d’approvisionnement, y compris à l’étranger. À ce titre, la CGT-FAPT estime que la responsabilité juridique et morale d’Orange est pleinement engagée dans cette affaire, même si les salariées sont employées par un prestataire externe.

Les syndicats dénoncent régulièrement une pression sur les salariés, des restrictions à la liberté syndicale, et des sanctions jugées arbitraires. Pour l’UMT, la sanction infligée aux trois salariées s’inscrit dans une logique de répression syndicale déguisée, visant à décourager toute tentative d’organisation collective au sein de l’entreprise.

L’affaire soulève une problématique plus large, celle du manque de contrôle effectif des donneurs d’ordre sur les pratiques de leurs sous-traitants dans les pays du Sud. En invoquant la loi sur le devoir de vigilance, la CGT-FAPT entend replacer ce dossier dans un cadre légal contraignant, à l’heure où plusieurs contentieux similaires ont été ouverts devant les juridictions françaises contre des multinationales opérant en Afrique et en Asie.

L’enjeu est de taille : si la plainte syndicale est suivie d’effet, cela pourrait ouvrir la voie à une action en justice, en cas d’inaction d’Orange. Le risque réputationnel est également réel, dans un contexte où les entreprises du CAC 40 sont de plus en plus scrutées pour la cohérence entre leurs engagements RSE et les réalités de terrain.

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