À Rabat, l’AES défend une nouvelle architecture sécuritaire face à la menace terroriste
La première Conférence internationale dédiée aux victimes africaines du terrorisme organisée à Rabat le 2 décembre 2025 a offert une tribune stratégique à l’Alliance des États du Sahel (AES), venue défendre sa vision souveraine de la lutte antiterroriste. En exposant ses choix sécuritaires et son analyse de la menace, l’AES a marqué les débats, confirmant la place de Rabat comme plateforme de dialogue et de coopération régionale renforcée.
Dans un geste diplomatique d’une portée historique, le Royaume du Maroc, en partenariat avec le Bureau des Nations unies de lutte contre le terrorisme (UNOCT), a accueilli la toute première Conférence internationale dédiée aux victimes africaines du terrorisme. Cet événement sans précédent a transformé la capitale marocaine en un carrefour de dialogue et de solidarité, réunissant des délégations ministérielles, des organisations internationales, et, pour la première fois avec une telle solennité, les associations de victimes venues de tout le continent.
En plaçant les survivants au cœur des stratégies de prévention et de reconstruction, cette conférence marque un tournant décisif et confirme le rôle du Maroc comme un pilier de la stabilité et de la sécurité régionales. L’initiative, saluée unanimement par les participants, a permis de déplacer le curseur du débat, allant au-delà des statistiques pour aborder la dimension profondément humaine de cette tragédie.
Comme l’a souligné le ministre des Affaires étrangères, de la Coopération régionale et des Burkinabè de l’extérieur, M. Karamoko Jean Marie Traoré, il est impératif de se souvenir que « derrière ces chiffres, il y a des familles, […] il y a des enfants qui sont coupés [de l’école], il y a des femmes qui vivent par la frustration dans les camps de déplacés ». Cette conférence a offert une tribune pour ces voix trop souvent réduites au silence, rappelant que les victimes ne sont pas une abstraction statistique, mais des individus aspirant à la dignité, privés de leurs terres, de leurs moyens de subsistance et de leur avenir par la brutalité de la terreur.
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Face à ce fléau qui n’épargne aucune région, les interventions ont mis en lumière une Afrique résiliente, qui puise dans ses valeurs de solidarité pour panser ses plaies. Les témoignages ont abondé sur l’accueil de millions de personnes déplacées et de réfugiés par des pays frères, à l’image du Mali et du Niger qui ouvrent leurs portes à ceux qui fuient la violence.
Quand la résilience des victimes devient moteur de reconstruction sociale
Plus encore, la conférence a célébré la résilience des victimes, qui cherchent à redevenir des acteurs de leur propre destin. L’exemple de ces femmes qui, au lieu d’attendre les aides humanitaires, se lancent dans de petites entreprises pour subvenir aux besoins de leurs familles, illustre cette volonté farouche de passer du statut de victime à celui de citoyen à part entière, contribuant activement à la reconstruction du tissu social.
Dans ce contexte, les stratégies nationales de prise en charge ont été largement débattues. Le Mali, en première ligne depuis plus d’une décennie, a partagé son expérience à travers la voix de son ministre de la Réconciliation, de la Paix et de la Cohésion nationale M. Ismaël Wagué. Ce dernier a expliqué la mise en place de structures dédiées non seulement à l’indemnisation, mais aussi à la réconciliation et à la création d’un climat de confiance entre les populations et l’État. « S’occuper des victimes, c’est aussi une façon de lutter contre le terrorisme », a-t-il affirmé, tout en plaidant pour une « approche collégiale » afin de mutualiser les efforts à l’échelle continentale.
Cette vision a trouvé un écho favorable, la conférence de Rabat étant perçue comme le catalyseur de cette nécessaire coopération. La rencontre a également été le théâtre d’expressions diplomatiques franches. M. Bakary Yaou Sangaré, ministre des affaires étrangères, de la Coopération et des Nigériens à l’extérieur, tout en remerciant le Maroc pour son hospitalité, a livré une analyse de la situation sécuritaire dans sa région. Dénonçant un terrorisme « importé et imposé », il a justifié la création de l’AES et le départ des forces étrangères par une volonté de reprise en main souveraine de la lutte antiterroriste. Selon lui, cette nouvelle posture a permis aux armées nationales de gagner en autonomie et de couper les lignes d’approvisionnement des groupes terroristes. Écoutée avec une attention respectueuse, cette voix illustre le rôle de Rabat à rassembler dans un même esprit constructif.

