l’autonomie marocaine gagne du terrain à l’ONU
À quelques semaines d’une réunion déterminante du Conseil de sécurité des Nations unies, prévue en octobre, les lignes diplomatiques autour du Sahara connaissent une inflexion notable. Longtemps cantonné à un exercice de routine autour du mandat de la MINURSO, le débat s’oriente désormais vers une remise en cause du statu quo et un glissement en faveur du plan d’autonomie proposé par Rabat.
Le basculement est perceptible au sein même des grandes capitales. Le 1er juin 2025, Londres a rejoint Washington et Paris parmi les membres permanents du Conseil de sécurité qui qualifient le plan marocain de « crédible, viable et pragmatique ». Dans le sillage de ce trio occidental, plusieurs États africains ont révisé leur position : le Ghana estime que l’autonomie constitue « la seule base réaliste et durable » pour un règlement politique, tandis que le Kenya a officialisé son soutien après un sommet bilatéral à Nairobi.
Cette dynamique n’est pas cantonnée au continent africain. À Genève, une coalition de quarante pays emmenée par le Qatar a réaffirmé son appui à la souveraineté marocaine et aux institutions en place dans les provinces du Sud. L’addition de ces signaux traduit une érosion progressive du front traditionnellement favorable au Polisario et renforce l’argumentaire de Rabat, qui mise sur la légitimité institutionnelle et le développement économique des territoires sahariens pour crédibiliser sa démarche.
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Dans ce contexte, la mission onusienne de maintien de la paix, en place depuis 1991, apparaît de plus en plus fragilisée. Le médiateur Staffan de Mistura, nommé en 2021, voit sa marge de manœuvre réduite face à l’alignement croissant des grandes puissances sur la thèse marocaine. Washington a récemment rappelé que « l’autonomie véritable, sous souveraineté marocaine, est la seule solution faisable ». Des think tanks américains, à l’instar de l’American Enterprise Institute, jugent même que la MINURSO entretient l’illusion d’un processus politique sans issue.
Le constat n’est pas nouveau. Dès 2023, plusieurs membres du Conseil de sécurité avaient souligné le caractère « sérieux et crédible » du plan marocain. Des centres de réflexion, comme le Policy Center basé à Rabat, insistent sur la nécessité pour l’ONU de se repositionner en acteur décisif, plutôt qu’en gestionnaire passif d’un cessez-le-feu devenu caduc.
Cette recomposition diplomatique pèse directement sur Alger, qui persiste à défendre le référendum d’autodétermination comme seul horizon politique. Mais l’argument peine à convaincre, d’autant que la diplomatie marocaine a multiplié les initiatives concrètes : ouverture de consulats à Laâyoune et Dakhla, intégration des provinces sahariennes aux projets liés à la Coupe du monde 2030, et ancrage des investissements dans les infrastructures et les énergies renouvelables.
Dans les faits, le narratif marocain tend à transformer la question du Sahara en un dossier de stabilité régionale et de coopération sud-sud. Pour Rabat, le pari est double : consolider son autorité sur le terrain tout en capitalisant sur l’évolution du droit international, qui articule désormais plus clairement intégrité territoriale et autodétermination interne.
L’Europe et l’Afrique en convergence
L’Espagne a été la première puissance européenne à franchir le pas, en qualifiant officiellement l’autonomie de « solution la plus sérieuse, réaliste et crédible ». Paris lui a emboîté le pas, Emmanuel Macron estimant que cette option constitue désormais « la seule base » de négociation. Même si des contentieux subsistent avec l’Union européenne sur l’application des accords agricoles et halieutiques aux territoires sahariens, le cap diplomatique est clair : l’alignement croissant de l’Europe occidentale avec Rabat.
En Afrique, l’Union africaine demeure divisée, mais plusieurs capitales, du Ghana au Kenya, ont infléchi leur position. L’isolement du Polisario s’accroît, alors que les projets marocains de développement et d’intégration régionale séduisent par leur pragmatisme.
À mesure que s’approche l’échéance d’octobre, les équilibres au sein du Conseil de sécurité paraissent se modifier. Le plan d’autonomie marocain, proposé en 2007 et longtemps considéré comme une option parmi d’autres, s’impose progressivement comme le seul compromis praticable. La crispation d’Alger contraste avec l’adhésion croissante de ses partenaires africains et européens, tandis que la MINURSO voit sa pertinence remise en cause.
Le Sahara n’est plus seulement une question d’autodétermination territoriale. Il devient un enjeu de stabilité régionale, de développement économique et de recomposition diplomatique. Et dans cette nouvelle grille de lecture, le Maroc semble avoir pris une longueur d’avance.