Economie

Nouvelle filière pour les campagnes marocaines

Longtemps associé à l’économie parallèle, le cannabis amorce au Maroc une révolution silencieuse. En encadrant strictement sa culture à des fins médicales et industrielles, le Royaume transforme un héritage rural en levier de développement, d’inclusion sociale et de rayonnement international.

Dès la reconnaissance par l’ONU, fin 2020, des usages médicaux et industriels du cannabis, le Royaume a engagé une transformation sans précédent de son secteur agricole, notamment l’adoption de la loi 13‑21 en août 2021 et le lancement, dès 2022, d’un cadre réglementaire complet pour neuf activités, de l’importation de semences à la vente de produits finis, selon le Bulletin Officiel n° 6992‑bis du 31 août 2021.

 Cette initiative vise à structurer la filière et à éloigner durablement les producteurs du marché clandestin. Elle prévoit que l’intégralité des procédures, de la graine au transport, soit supervisée et digitalisée à plus de 95 %, selon les données présentées par l’Agence nationale de réglementation des activités relatives au cannabis (ANRAC), le jeudi 26 décembre 2024 à Rabat, lors de son conseil d’administration consacré à l’état d’avancement des réalisations techniques et financières de l’exercice 2024 et au programme d’action de la campagne 2025.

Lire aussi : Cannabis légal : l’ANRAC durcit le ton pour structurer durablement le secteur

En effet, le Maroc est le premier producteur mondial de cannabis, selon le rapport annuel sur les drogues de l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC), publié le 27 juin 2022 à Vienne, à l’occasion de la Journée internationale contre l’abus et le trafic de drogues. Le Royaume cultive entre 40 000 et 50 000 hectares, soit près d’un tiers de la production mondiale, mais seule 10 % de cette surface relève aujourd’hui de la culture légale.

Avec des coûts de production maîtrisés — estimés entre 55 000 et 60 000 dirhams par hectare — et des prix garantis de 75 dirhams/kg pour la plante verte et 50 dirhams/kg pour la plante sèche, la filière marocaine, compétitive, se positionne favorablement pour conquérir les marchés européen et nord-américain. En 2024, une première exportation officielle d’une centaine de kilos de résine à usage thérapeutique a été réalisée vers la Suisse, à un prix compris entre 1 400 et 1 800 euros le kilo, d’après les données de l’ANRAC.

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Vers un marché vert prometteur

Par ailleurs, la production reste concentrée dans les provinces historiques comme Chefchaouen, Al Hoceïma, Taounate, où l’accès à la filière repose sur la justification d’une résidence locale, d’un titre foncier ou d’un bail de cinq ans ainsi que l’adhésion à une coopérative agréée selon les données présentées par le ministre de l’Intérieur, M. Abdelouafi Laftit, en Conseil du gouvernement réuni en mars 2022.

En outre, en 2024, selon le bilan de l’ANRAC, 2 169 hectares ont été consacrés à la culture licite du cannabis, impliquant 2 647 agriculteurs affiliés à 189 coopératives, une progression remarquable par rapport à l’année précédente

Face aux producteurs européens et nord‑américains, selon les médias, le Maroc mise sur la variété locale « Beldia » dont la floraison précoce et les faibles besoins en eau en font un atout écologique et économique. Les laboratoires nationaux, sous la supervision de l’Institut de criminalistique de la gendarmerie royale, garantissent la conformité des lots destinés à l’exportation, tout en explorant de nouveaux débouchés industriels (textile, plasturgie, matériaux de construction).

Selon la Fédération marocaine de l’industrie et de l’innovation pharmaceutique, le segment médical peut générer entre 4,2 et 6,3 milliards de dirhams de revenus annuels d’ici 2028, sous réserve d’une part de 10 à 15 % sur le marché européen.

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