Thérapie de couple : Déborah ( 43 ans ) et Samuel ( 45 ans ), « Il rentrait du bureau et il se mettait à jouer à la console »
Pour Déborah, Samuel a particulièrement bien géré les confinements : « Il a organisé son travail pour pouvoir n’être connecté que quand les enfants étaient endormis ou occupés eux-mêmes. Il a géré mille trucs. Il a pris sa part du ménage et des courses. Et des devoirs des enfants aussi. Je ne me suis jamais sentie toute seule, contrairement à plusieurs de mes amies. Je n’avais rien à dire sur lui. Il a été parfait. C’est pour ça que début 2021, quand on commençait tout juste à y voir plus clair, je lui ai proposé de partir en week-end avec ses amis. Je pensais qu’il le méritait et qu’il devait aussi avoir besoin, comme moi, de faire quelque chose juste pour lui. Je pense encore aujourd’hui que c’était une bonne décision mais c’est vrai que tout avait changé à son retour. »
Une thérapie pour crever l’abcès
Très vite, Déborah ne reconnait plus son mari : « Il rentrait du bureau et il se mettait à jouer à la console. Il jouait un peu avec les garçons quand ils le demandaient, mais il était surtout concentré sur ses activités. Quand il jouait en ligne, il se mettait même dans une pièce à part et je l’entendais rire et crier comme si on n’était pas là. Il ne m’aidait plus pour les dîners. Je ne pouvais plus compter sur lui pour gérer les douches des garçons, les devoirs ou préparer les affaires pour le lendemain. Au début, je me disais qu’il en avait besoin et que c’était normal de décompresser. Et puis j’ai commencé à me sentir très fatiguée de tout gérer. La seule conversation qu’on a eue à deux sur le sujet a vite dégénéré. Il a dormi sur le canapé. »
« Ce rendez-vous c’était sa manière de se battre pour nous »
Mais Déborah ne veut pas que cette situation s’installe : « J’en ai parlé à une amie. Je savais qu’elle n’allait pas me juger, ni lui, et qu’elle allait proposer des conseils. C’est elle qui a pensé à la thérapie de couple. Pour elle, il y avait un truc sérieux à discuter et je n’allais pas réussir à tenir bien longtemps. J’étais déjà épuisée, à bout. J’ai pris rendez-vous en ligne sans en parler à Samuel. Je me suis dit que ça serait plus simple à accepter si c’était déjà fait. Je le connais bien. Autant je savais qu’une discussion à deux c’était impossible, autant j’étais sûre qu’il ne dirait jamais non à un rendez-vous déjà pris. C’est comme ça que je l’oblige à aller chez le médecin en général. J’ai pris le rendez-vous sur mon portable, alors que mon amie était encore là. Et j’en ai parlé tout de suite en rentrant à la maison. J’ai dit : « On ne va pas s’engueuler encore pour ça mais je veux qu’on aille voir un psy ensemble. » Il a été étonné mais il a fait signe qu’il était d’accord. On a eu le premier rendez-vous la semaine suivante. »
Apprendre à parler
Samuel ne s’attendait pas à ce que sa femme réagisse de cette manière : « Moi, je demandais juste qu’on me fiche la paix. Je ne pensais pas qu’elle en aurait quelque chose à faire ou même qu’elle allait en souffrir. À ce moment-là, j’étais incapable de me dire qu’il y avait un problème. J’étais vraiment mal. Avec le recul, je me dis que j’ai eu de la chance d’avoir une femme qui se pose des questions et qui essaye d’arranger les choses. Elle aurait pu juste trouver que je me comportais comme un gros con égoïste, ce qui était le cas, et me laisser tomber. Mais Deb n’est pas comme ça. Elle se bat. Donc même si au début je ne l’ai pas réalisé, ce rendez-vous c’était sa manière de se battre pour nous. »
« Très vite, je sortais des séances en me sentant très amoureux de ma femme »
Ils voient le psychologue ensemble pendant un peu plus d’une année : « Il y avait deux gros points à travailler, d’abord le quotidien à deux et à quatre et ensuite comment j’intégrais, ou pas, Déborah à mes problèmes. En fait, pendant des années, ça s’est passé parfaitement, sans avoir besoin de communiquer. Donc on ne savait pas faire. Je ne savais pas faire, plutôt. Deb, elle, aurait pu s’en sortir sans problème, comme d’habitude. J’ai donc été un peu touché par les confinements, l’ambiance générale, le stress au travail, le stress en général et je n’ai rien dit pendant des mois. Avec les potes, j’ai lâché du lest et c’est ça qui m’a fait vriller à la maison. Après, je n’ai pas été capable de parler, de raconter ce qui se passait dans ma tête et puis ça a été trop tard et je n’avais plus de vision du tout, ni du présent ni de notre futur en tant que famille. Je n’arrivais plus à me projeter. Et là, oui, il n’y avait rien d’autre à faire que d’aller chercher de l’aide à l’extérieur. C’était vraiment la bonne idée. On a pris les problèmes les uns après les autres. J’ai parlé plus que je n’avais jamais parlé avant. Ça a réveillé plein de sentiments. Des négatifs, c’est sûr, mais aussi des positifs. Très vite, je sortais des séances en me sentant très amoureux de ma femme. C’est ce qui m’a motivé à aller au bout. Je sentais qu’on avançait ensemble et que ça allait nous renforcer. C’est vraiment ce qui s’est passé. »