Qu’est-ce que la « honte sexuelle », qui empêche certaines femmes de s’épanouir au lit ?
La « honte sexuelle » peut avoir un impact sur l’excitation, le désir, l’orgasme ou encore la douleur, selon deux expertes canadiennes.
Quand l’image de soi affecte le bien-être sexuel des femmes. Compatibilité sexuelle, consentement, communication, confiance en soi et en son partenaire… Plusieurs facteurs participent à l’épanouissement sexuel. À l’inverse, certains blocages peuvent survenir et diminuer le plaisir sexuel. C’est le cas de la « honte sexuelle ».
Selon la grande enquête de l’Inserm sur la sexualité des Françaises et des Français, publiée le 13 novembre dernier, la proportion des femmes se déclarant très satisfaites de leur vie sexuelle est passée de 47 % en 1992 à 45,3 % en 2023. Si cette tendance est restée relativement stable au fil du temps, certaines femmes ne sont pas forcément heureuses sous la couette. À travers une étude publiée dans la revue « Sexes », les chercheuses canadiennes en psychologie, Camilla Graziani et Meredith Chivers, se sont penchées sur la « honte sexuelle », dont souffrent certaines femmes, et qui les empêche de prendre du plaisir au lit. En effet, ce phénomène « affecte négativement le fonctionnement sexuel des femmes, impactant l’excitation, le désir, l’orgasme et la douleur », indiquent les expertes. Mais de quoi s’agit-il exactement ?
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Honte sexuelle : « un sentiment viscéral de dégoût et d’humiliation à l’égard de son corps »
Dans ses travaux intitulés « The Etiology and Phenomenology of Sexual Shame », repérés par « Psychologies Magazine », Noel Clark définit la honte sexuelle comme « un sentiment viscéral de dégoût et d’humiliation à l’égard de son corps physique, de son être sexuel et de son identité, et qui inclut des croyances et des sentiments d’infériorité, d’inadéquation et d’impuissance, qui font que l’on se perçoit comme imparfait et défectueux ». Selon lui, la honte sexuelle peut prendre quatre formes différentes : la honte sexuelle intériorisée, la honte relationnelle avec le partenaire, la honte corporelle/biologique et la honte liée à la vulnérabilité.
Honte sexuelle : quels impacts sur la sexualité ?
De multiples facteurs peuvent contribuer à la honte sexuelle, soulignent Camilla Graziani et Meredith Chivers, qui s’appuient sur plusieurs études empiriques et des thèses écrites sur le sujet : les injonctions socioculturelles, l’image de soi corporelle et génitale, les schémas personnels sexuels, la douleur sexuelle, les problèmes de santé ou encore les traumatismes sexuels. Or, « la relation entre la honte sexuelle et le fonctionnement sexuel est souvent réciproque, démontrant que la honte sexuelle est un mécanisme potentiel de causalité et de maintien sous-jacent aux difficultés sexuelles des femmes », expliquent-elles. En effet, la honte sexuelle peut supprimer le désir, entraîner de l’anxiété liée à l’intimité, une dissociation lors des rapports sexuels, une difficulté à exprimer ses limites. Ces freins peuvent affecter l’estime de soi, le bien-être émotionnel et la capacité à nouer des relations saines et épanouissantes.
Quelles approches thérapeutiques pour sortir de la honte sexuelle ?
« Compte tenu de l’impact de la honte sexuelle sur le fonctionnement sexuel des femmes, des approches thérapeutiques ciblant la honte sexuelle sont recommandées pour aider à atténuer les difficultés liées à l’excitation sexuelle, au désir, à l’orgasme et à la douleur sexuelle », recommandent les expertes. Ce travail sur soi peut prendre différentes formes : des interventions thérapeutiques qui se concentrent sur les facteurs émotionnels, en particulier la honte et la colère (psychoéducation, restructuration cognitive, approches basées sur la pleine conscience et les croyances négatives type MBCT, thérapie de groupe), ou encore l’auto-compassion.