Lien avec anxiété, stress… Qu’est-ce que le nerf vague ?
Massage, respiration… De nombreuses techniques sont présentées sur les réseaux sociaux pour stimuler le nerf vague et calmer l’anxiété, le stress, etc. Mais c’est quoi le nerf vague ? Et a-t-il vraiment à voir avec la santé mentale ?
Qu’est-ce que le nerf vague ?
Le nerf vague ou nerf pneumogastrique est le plus grand du corps humain. Il relie le cerveau à l’intestin. Ils sont en fait deux, un pour chaque côté du corps, et appartiennent aux douze paires de nerfs crâniens. Ils en sont la dixième paire. Il joue un rôle dans de nombreuses fonctions vitales notamment sur la fréquence cardiaque et les sécrétions digestives. Il est également relié à des parties du cerveau en charge des émotions.
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Une lésion du nerf pneumogastrique peut se traduire par une baisse du rythme cardiaque (bradycardie), une tendance aux syncopes et à l’anxiété, une diminution du calibre des pupilles (myosis), une transpiration excessive des membres, une sécrétion accrue de salive, des spasmes musculaires, des épisodes de diarrhées ou de troubles de la respiration ou des malaises vagaux.
Alors quel rapport avec la santé mentale ?
Une étude conjointe de l’Inserm, de l’institut Pasteur et du CNRS, parue en mai 2023, a montré que le nerf vague conditionne la survenue d’une dépression entraînée par des anomalies de la flore intestinale.
L’association entre dépression et déséquilibre intestinal n’est pas nouvelle. Plusieurs études ont prouvé que les personnes atteintes de dépression présentent des déséquilibres entre les bactéries de leur système digestif. Certaines sont déficitaires et d’autres au contraire sont en excès. Transférer la flore d’un individu qui souffre de dépression à un autre sain suffit à déclencher une dépression chez ce dernier. Mais jusque-là, le mécanisme biologique qui sous-tendait cette association restait énigmatique.
Des chercheurs se sont donc penchés sur le rôle du nerf vague dans la dépression. Ils ont transféré des microbiotes de souris souffrant de dépression à des souris saines, avec une particularité : certaines souris avaient un nerf vague indemne, d’autres en avaient un sectionné à l’abdomen. En d’autres termes, pour le second cas, le nerf vague n’était plus relié à l’intestin. D’après les conclusions de l’étude, le transfert n’a pas induit de dépression chez les souris du second groupe. « La vagotomie a provoqué un découplage de l’intestin et du cerveau qui a suffi à préserver les sujets de l’état dépressif provoqué par la dysbiose intestinale », clarifie Eleni Siopi, première autrice de ces travaux pour l’Inserm.
La stimulation du nerf vague aurait également des bienfaits pour lutter contre la dépression résistante et les troubles bipolaires. Il s’agit d’une procédure chirurgicale mini-invasive ambulatoire : une sorte de pacemaker est attaché au niveau du nerf vague dans le cou, sous la peau. « Cette technique existe depuis une vingtaine d’années, elle est également utilisée pour traiter l’épilepsie et elle a prouvé son efficacité contre les dépressions résistantes », indique Philippe Domenech, médecin psychiatre, sur le site du GHU Paris Psychiatrie et neurosciences.
Le premier système de neuromodulation du nerf vague en France a été posé en mai 2024 au GHU. « L’objectif de ce protocole est d’étudier si la stimulation du nerf vague est une option thérapeutique qui devrait être remboursée en France parce que médico-économiquement efficace pour les patients qui souffrent de maladies bipolaires et de dépression unipolaire résistantes aux traitements », ajoute Philippe Domenech. Au total, 180 patients devraient bénéficier de ce protocole.
De nouveaux traitements ?
Pour Eleni Siopi, ces découvertes ouvrent aussi la voie à des perspectives thérapeutiques. « Stimuler le nerf vague grâce à la méditation ou encore des massages pourrait renforcer l’effet des traitements grâce à un meilleur contrôle du stress. En outre, moduler l’activité de protéines ou molécules spécifiques du nerf vague pourrait aider à lutter contre la sévérité ou la récidive de la dépression chez les patients », espère-t-elle.
« À l’heure actuelle, seulement un tiers des patients sont efficacement soulagés par les médicaments, c’est dire comme des solutions complémentaires sont attendues », conclut-elle.