Art & Culture

Emotion, exception et passions partagées pour l’hommage à Edmond Amran El Maleh au pavillon du Maroc

Un hommage marqué du double sceau de l’émotion et de l’exception a été rendu, samedi au Grand Palais de la capitale française à l’écrivain et intellectuel Edmond Amran El Maleh, figure emblématique de la littérature marocaine, dans le cadre de la programmation « Lettres du Maroc » rythmant sur trois jours les activités du Pavillon du Maroc, invité d’honneur au Festival du livre de Paris (11-13 avril).

La rencontre, modérée par Driss Khrouz président de la fondation Edmond Amran El Maleh a réuni amis du défunt et fins connaisseurs de son œuvre prolifique, dont le Conseiller de SM le Roi et président fondateur de l’Association Essaouira-Mogador, André Azoulay, l’universitaire Mohamed Tozy, ainsi que l’auteur et réalisatrice de documentaire Simone Bitton.

Devant une salle comble, les intervenants ont croisé leurs regards sur le legs impressionnant de l’écrivain et intellectuel marocain « engagé » qui continue de fasciner, tant par son parcours, son écriture et l’inépuisable inspiration de son imaginaire.

“Compagnon de route précieux et exigeant, mentor éclairé et pionnier, Hajj Edmond aurait été le plus heureux des Marocains en ce 12 avril 2025, au milieu de ces milliers de visiteurs rassemblés pour fêter le livre et débattre autour de tous les livres ” a déclaré M. Azoulay, rappelant “qu’il avait eu avec Edmond Amran Elmaleh l’amour et la passion d’Essaouira en partage”.

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M. Azoulay lui a réitéré “son infinie gratitude pour les plus belles pages qu’il a écrites sur cette saga souirie et son Judaïsme éclairé qui nous a appris très tôt à tous les deux comme à beaucoup d’autres que c’est en veillant à la dignité et à la liberté de l’autre qui était en face de nous et qui n’était pas Juif que se modelaient et se nourrissaient la pérennité, l’éthique et la modernité philosophique et sociale du Judaïsme marocain.”

Mettant en relief “ la singularité et l’ADN à nul autre pareil de cet intellectuel hors normes qui a su avec bonheur faire se rencontrer, se conjuguer et se nourrir l’un de l’autre son engagement politique et nationaliste et sa soif inextinguible de raconter et partager ses passions marocaines avec cette signature qui lui est propre d’être toujours présent dans les histoires qu’il nous raconte”, M. Azoulay a expliqué pourquoi jusqu’à sa disparition Edmond Amran El Maleh avait “gardé les mêmes convictions, les mêmes fureurs, les mêmes radicalités quand son Maroc était incompris, lui disait sans précaution trahi, par ceux qui à ses yeux n’avaient pas su prendre dans leurs écrits ou leurs interventions la juste mesure de la profondeur et de la richesse du legs patrimonial, culturel et social de la civilisation marocaine”.

Militant, pédagogue, poète, critique d’art, philosophe et fin gourmet, Edmond Amran El Maleh était «à lui seul l’incarnation d’une génération synthèse vivante d’une école qui a su faire du Maroc le lieu constitutif de son œuvre», a ajouté le Conseiller de SM le Roi avant de consacrer une large partie de son intervention au rôle déterminant d’Edmond Amran El Maleh « dans la compréhension, le soutien et la promotion des arts contemporains marocains ».

Rappelant ses écrits s’élevant contre la dichotomie aux tentations de laquelle beaucoup n’avaient pas su résister entre Art et Artisanat, Elmaleh a longuement disserté sur « nos traditions millénaires qui portent en elles la richesse esthétique de la réalité sociale et culturelle de la société marocaine », a ajouté M. Azoulay en citant Eugène Delacroix qui en son temps avait qualifié de magnifiques tableaux les tapis marocains tout comme Matisse et d’autres grands maîtres avaient souvent théorisé sur la place du Maroc dans leurs choix artistiques et esthétiques.

En accompagnant avec constance et rigueur l’émergence et l’épanouissement de l’école marocaine des Arts plastiques Hajj Edmond « a choisi son camp dés 1976 aux côtés et en soutien d’Ahmed Cherkaoui dont l’œuvre ouvrait grande la porte à la peinture marocaine désormais candidate aux cimaises des plus grands », a rappelé pour conclure le Conseiller de SM le Roi en invitant l’audience à lire ou à relire les écrits d’Amrane El Maleh souvent qualifié de « peintre des mots pour nous dire et nous convaincre de la place et de la centralité des arts plastiques, incarnations emblématiques de l’expression contemporaine de la scène culturelle dans notre pays ».

La passion d’Edmond Amran El Maleh pour la peinture et les arts plastiques a été amplement soulignée lors de cette rencontre, les intervenants ayant mis l’accent son œuvre aux influences multiples.

Dans sa perception des écrits de ce grand intellectuel, M. Tozy retient « une littérature tardive » qui tient au fait qu’Edmond Amran El Maleh était d’abord « un professionnel de la politique ».

Il présente sa reconversion comme « l’aboutissement d’un processus d’écritures en éclats, fragmentées ».

Le chercheur inscrit cette évolution dans un processus de reconstruction du récit qui trouve son aboutissement au Maroc avec la Constitution de 2011 dont le préambule, a-t-il relevé, raconte « cette identité plurielle » le caractérisant.

Dans le même sens, Simone Bitton qui consacre à E.A El Maleh son dernier film, “Les mille et un jours du Hajj Edmond”, (2024), a affirmé qu’il a fallu 60 ans à ce dernier pour quitter « la langue de bois » et « oser l’écriture littéraire », un style qu’il a fini par adopter pendant une trentaine d’années.

« Il écrivait tous les jours et de tout : tracts, romans, critiques d’art, recettes de cuisines… », a dit celle qui avoue avoir appris beaucoup sur cette icône de la scène intellectuelle et culturelle marocaine, y compris dans le domaine des arts plastiques.

La dimension mystique de son œuvre a également été abordée lors de cette rencontre qui a été suivie par un échange avec le public. Ce dernier a particulièrement salué l’initiative de la fondation Edmond Amrane El Maleh de rééditer l’ensemble des travaux du défunt.

A rappeler que le Maroc participe cette année au festival du livre de Paris en tant qu’invité d’honneur avec un pavillon qui s’étend sur 330 m² offrant une programmation aussi riche que variée, avec 28 rencontres sur l’espace conférences, 16 panels sur des thématiques littéraires et sociétales, 10 présentations de livres, 2 performances artistiques (slam et théâtre), ainsi qu’un panel international sur le “Destin atlantique France-Maroc”, en rapport avec la thématique de cette édition « la mer».

Avec MAP

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