Economie

l’Office des Changes aux trousses des acheteurs de luxe

Soupçonnés d’avoir acquis discrètement des montres et des bijoux de luxe à l’étranger via des circuits financiers opaques, plusieurs Marocains fortunés font l’objet d’enquêtes menées par l’Office des Changes. À la clé, une traque renforcée des flux illégaux de devises, entre factures douteuses, réseaux sociaux et coopération internationale.

L’Office des Changes a lancé ces dernières semaines une vaste opération de contrôle visant des Marocains fortunés soupçonnés d’avoir acheté, en toute discrétion, des montres et des bijoux de très grande valeur en Europe, notamment en France et au Luxembourg. Le point commun de ces affaires ? Des paiements jugés opaques, non déclarés aux frontières, et en infraction avec la législation marocaine sur les devises.

Les autorités ont ouvert plusieurs enquêtes après avoir constaté une recrudescence de paiements non déclarés effectués à l’étranger pour l’acquisition de produits de luxe. Ces opérations ont été repérées grâce à des échanges d’informations avec des institutions européennes dans le cadre de la lutte contre le blanchiment d’argent et la fuite illicite de capitaux.

Les sommes en jeu dépassent de loin les plafonds fixés pour les allocations de devises destinées aux voyages, qu’ils soient à but touristique ou professionnel. Certains achats atteignent des montants vertigineux, notamment pour des montres suisses de luxe affichées à plus de 60 000 euros l’unité. Face à ces dépenses, les acheteurs doivent désormais justifier clairement la provenance des fonds engagés.

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Selon les médias, un dossier en particulier a retenu l’attention des autorités. Il s’agit d’un homme d’affaires marocain ayant intenté une action en justice contre une boutique parisienne d’horlogerie de luxe, après avoir constaté un défaut sur une montre encore sous garantie. Ce litige a éveillé des soupçons. En examinant ses déplacements et les montants en devises qu’il avait déclarés au cours des quatre dernières années, les enquêteurs ont relevé d’importantes incohérences, renforçant l’hypothèse de transferts illicites de capitaux vers l’étranger.

Pour affiner ses investigations, l’Office des Changes ne se limite plus aux documents officiels. Il s’appuie aussi sur les réseaux sociaux, devenus une véritable mine d’informations. Les publications Instagram ou Facebook montrant des montres de luxe, des bijoux ou des séjours fastueux sont désormais comparées aux déclarations faites aux douanes marocaines.

Parmi les pratiques suspectes repérées, certains produits de luxe achetés neufs à l’étranger seraient réglés via des virements émis depuis des comptes bancaires de Marocains résidant à l’étranger ou de ressortissants étrangers. Une fois livrés, ces objets sont parfois requalifiés en ventes d’occasion, une stratégie visant à contourner les déclarations obligatoires et les droits de douane.

Même si le droit européen impose une garantie légale de deux ans pour ce type de biens, la traçabilité financière reste stricte. Pour importer légalement une montre ou un bijou de valeur au Maroc, il ne suffit pas de présenter une facture. Il faut également être en mesure de prouver l’origine licite des fonds ayant servi à l’achat.

Face à l’ampleur du phénomène, l’Office des Changes renforce ses contrôles et adresse des mises en demeure aux personnes soupçonnées de ne pas respecter la réglementation. Son objectif est clair : rétablir l’ordre, sanctionner les fraudes et freiner l’hémorragie de devises liée à des achats de luxe effectués à l’étranger sans déclaration préalable.

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